samedi, février 18, 2012

Vers le retour de l'humain

Voici un article du sud ouest du 12 février  dernier sur l'ancien chirurgien et maintenant thérapeute thierry Janssen.
Croire en ce que l'on défend, cohérence par rapport à ce que l'on ressent sont les obligations de notre métier et surtout restons humbles.
Les gens cherchent du sens, deviennent actifs par rapport à la maladie et deviennent responsables par rapport aux évènements de la vie.
Bonne lecture et merci Monsieur Janssen !

Thierry Janssen donne des conférences partout en Europe.

Thierry Janssen donne des conférences partout en Europe. (Photo Philippe Taris)



On serait tenté de vérifier qu'il n'a pas des ailes. Thierry Janssen, lisse et solaire, dispense la fluidité de l'ange. Depuis le regard jusqu'à la pensée, une façon aussi de se mouvoir dans l'espace. Sans heurt. À 16 heures, il boit de la verveine. À l'envers d'un Antonio Banderas, les femmes l'adorent tout autant. Pour ce qu'il dit. Ce Belge de 50 ans a plusieurs best-sellers à son actif, des essais autour du développement personnel qui invitent à une réflexion sur la santé et le bien-être, une posture nouvelle puisqu'elle a le mérite de faire bouger les lignes. 

À l'occasion de la sortie de son dernier ouvrage, « Le Défi positif », Thierry Janssen a tenu conférence à Bordeaux, seul face à 600 personnes.
« Sud Ouest Dimanche ». Seriez-vous un nouveau gourou de la génération « développement personnel » ?
Thierry Janssen. Sûrement pas. D'abord, je n'apporte pas de réponses, et je ne propose pas de recettes. Plutôt de nouvelles pistes de réflexion. Je n'ai rien construit, rien n'était prémédité au fond. Il m'a fallu trente secondes pour quitter mon bureau de chirurgien en 1998. Tout planter, parce que ça n'était plus ma vie. J'avais 35 ans, un CV en béton, mais je sentais l'absurdité qui m'avait conduit là, mes névroses, au fond. Des dents qui ratissaient au 5e sous-sol. Si j'étais resté là, je serais mort. Je donnais la faute aux autres, au CHU où je travaillais, à ses dysfonctionnements, jamais content. Le mal-être, en fait, était en moi.
Après trois semaines formidables à la maison, les factures sont arrivées, le jugement des parents, des amis. Un concours de circonstances m'a fait rencontrer le directeur de la maison de couture Georgio Armani. J'ai postulé, j'imaginais ce milieu pétillant, léger, j'étais en état de grâce et j'ai été embauché. Un an, au terme duquel je suis parti. J'ai entamé une psychanalyse jungienne, et j'ai commencé à recevoir des gens malades physiquement, et en souffrance psychique, pour les écouter. Dans la loge d'une conciergerie. Puis le bouche-à-oreille a été incroyable.

Pas gourou, plus médecin, vous êtes devenu un thérapeute sur le tas. Qu'est-ce qui a porté votre réflexion ?
En 2000, j'ai commencé à professionnaliser cette consultation, j'étais débordé et je voulais me mettre en ordre avec les règles. Ma légitimité de thérapeute était en question. Je m'étonnais du succès de cette consultation, et au fond je sentais bien que ce qui faisait la différence, c'était la cohérence. Ce que je proposais, je le vivais moi-même, très intensément. Je ne cherchais pas à séduire, à plaire, même pas à manipuler, le grand danger. Avoir quitté l'hôpital en trente secondes m'a donné une liberté que l'on ne m'enlèvera pas de sitôt. Pas de marketing ni de travail sur mon image, je n'avais même pas de téléphone, et pourtant, les gens venaient de partout. Le charisme est lié à cette cohérence, vous croyez totalement à ce que vous défendez.
Et que défendez-vous si totalement ?
On assiste à un mouvement, un bouleversement culturel. Désormais, les gens veulent être le plus réveillés possible face aux aléas de leur vie. Cet éveil est synonyme de discernement, d'objectivité et aussi de compassion vis-à-vis d'eux-mêmes et des autres. Je souhaite jeter un pont entre la culture scientifique dans laquelle j'ai longtemps baigné et les belles intuitions de la philosophie, la spiritualité, sans laisser de côté les approches thérapeutiques traditionnelles. Tout ça s'enrichit mutuellement : la médecine intégrative.
David Servan-Schreiber proposait aussi une forme de médecine intégrative, à sa façon, avec des recettes. Ce mouvement est enseigné dans les universités aux États-Unis depuis les années 1990, la France traîne les pieds. C'est le pays le plus conservateur que je connaisse, avec ce rapport paternaliste à l'autorité… l'Ordre des médecins.
Selon vous, les gens auraient donc envie de se soigner autrement ? D'envisager leur santé sans se soumettre à l'autorité d'un médecin, par exemple ?
Oui. D'où le succès des conférences, des livres. Les gens ont faim d'autre chose : être entendus, touchés, respectés, interrogés en profondeur, réconfortés… puis soignés. Sortir de cet état de passivité, face à la toute-puissance de la science. Ils veulent être responsables de répondre, or le système déresponsabilise les gens malades. Aujourd'hui, de plus en plus de symptômes deviennent des maladies classées comme telles. Exemple : une femme qui a ses règles est victime de troubles de l'humeur. C'est juste hormonal, donc normal. Eh bien, désormais, c'est devenu une pathologie classée. Une pathologie ? Ça se soigne avec des médicaments, anxiolytiques, antidépresseurs, etc. Nous sommes aspirés par le cynisme du monde marchand et des labos.
Mon livre « La Solution intérieure » a été un best-seller parce qu'il posait une graine dans ce sens. Le suivant, « La maladie a-t-elle un sens ? », en était la suite logique.

Vous venez de sortir après trois ans de silence « Le Défi positif », dernier opus de la trilogie. Il y est question de guérison, de quête du bonheur ?
Je suis tombé malade après « La maladie a-t-elle un sens ? ». 200 conférences en un an dans huit pays, je m'étais éloigné de moi-même, j'ai été victime d'un virus qui a provoqué une paralysie faciale, j'ai eu très peur pour ma vie. J'étais juste fâché contre moi-même. Alors j'ai stoppé la machine et je suis parti m'installer six mois en Égypte, une espèce de retraite dans un pays que j'aime. J'ai écrit un texte là-bas, mais finalement je l'y ai laissé, enterré dans une faille de la Vallée des rois. Je croyais ne plus avoir l'énergie d'écrire. En marchant, le désir est revenu. Quid du bonheur, de la santé ? Alors j'ai écrit « Le Défi positif » ou comment revaloriser l'être humain, son potentiel lumineux, vertueux, plutôt que travailler sur ses maladies, ses manques. Comment respiritualiser, comprendre l'esprit des choses, pour ne pas se laisser ballotter par les événements de la vie.

Alors, la « respiritualisation », phénomène de mode ou véritable prise de conscience d'une société ?
On est au-delà de la mode. Mais dans un véritable mouvement de civilisation, on change de représentation de soi et du monde. On s'est cru tout-puissant, on redevient humble, humain. On s'est pris pour des dieux
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